Parole de confinés : Max M

29 juillet, 2020
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Bonjour à tous
Le confinement nous a privés de bien des choses qui constituent nos relations représentant les raisons
mêmes de notre existence.
Les chants des oiseaux de ce printemps dernier me paraissant plus nombreux et plus familiers qu’aux
saisons précédentes. Les luzernes sauvages ont reconquis les bords des routes comme au temps où
ma grand-mère allait les cueillir à la faucille pour les faire sécher au soleil avant de les offrir en nourriture
aux animaux de la basse-cour. (Pour qui vit comme moi les fenêtres ouvertes « Victor Hugo »)Les
anciens nous parlaient des saisons de pluies durant les hivers ,où ils se retiraient dans les remises pour
réparer les licols des chevaux ou pour fabriquer des manches de pioche. Eh bien ! Durant le printemps
dernier, il a plu une semaine sans arrêt jour et nuit, une pluie régulière et gentille pour le bien de tous.
Bref ! Une pluie de saison, comme avant.
Comme le disait Marianne , nous avons la chance (pour certains) d’avoir notre « carré de terre » devant
la maison et ce soleil aussi qui nous amène la lumière du Sud, celle de la Méditerranée, celle qui, tous
les jours, hiver comme été, avec le Cers dominant emplit mes os de matière chaude, celle qui fait de
nous ce que nous sommes « des femmes, des hommes et des enfants du soleil » ! Je me sens bien
partout où se trouvent ces arbres magnifiques qui depuis la nuit des temps ont accompagné notre
culture épicurienne et qui concerne aussi les plaisirs de la table, « les olivarum ». Bien sûr que nous
sommes un peu loin du confinement, bien sûr que j’oublie Maman un instant et qui je crois m’oublie un
peu aussi ! Mais qu’est ce que j’en sais après tout ?
Pense-telle à moi ? « Moi », le mot n’est pas un peu égoïste ? Pense-t-elle à nous ? Se souvient-elle de
ses petits-enfants ? De ses arrières petits-enfants ? Qui apprennent la vie comme ces petits oiseaux qui
apprennent à voler ! Se souvient-elle de sa belle-fille qui vendangeait le vigne de la Coudoumine avec
son tablier à petits carreaux en 1976 pas très loin de La Caunette ?
Je t’ai revue Maman après cette période d’absence, tu étais belle, tu ne semblais pas affligée par le

confinement. S’est-il passé quelque chose ? Je pense même que tu étais plus ravissante qu’avant ! Est-
ce que le silence de l’institution te convient mieux que la présence de mes visites régulières ? Ma venue

te trouble-t-elle ? Dans ton regard fixé dans mon regard j’ai des difficultés à le soutenir, à le maintenir.
Tu as appris, comme toutes les mères, que les garçons les trahissent car ils disparaissent à jamais avec
leur femme ; est-ce cela que ton regard exprime ? Je ne sais pas !
Tu me dis quelque chose dans le silence que seul le chant des oiseaux accompagne. Ce silence n’aura
jamais d’expression mais il permet d’imaginer plein de choses. Est-il important de tout savoir ?
L’essentiel n’est-il pas dans la bonne conscience des hommes ? La culpabilité devient-elle nécessaire
pour se refaire bonne conscience ? Je ne sais pas, Maman !
Ce virus paradoxalement, s’il a tué beaucoup trop de gens a permis aussi de reconsidérer notre façon
de voir les choses ; c’est sûr, les grandes agglomérations ont subi le virus de plein fouet. Alors que les
campagnes et les villages ont été moins impactés du fait de leur population plus dispersée.
Le discours d’Albert Camus à Oslo quand il reçoit le prix Nobel de littérature en 1957 est sans
équivoque : « Chaque génération sans doute se croit vouée à refaire le monde. La mienne sait pourtant
qu’elle ne le refera pas ; mais sa tache est peut-être plus grande, elle consiste à empêcher que le
monde se défasse ». 10 décembre 1957